Que pèse aujourd’hui WARI en Afrique ?
Kabirou Mbodje – WARI est la première entreprise africaine en termes de données numériques.
Nous sommes présents dans 40 pays africains et plus de 200 millions de personnes utilisent notre plate-forme digitale dans des domaines très variés. Cela va de l’achat de crédit téléphonique au paiement des salaires ou des pensions, des bourses ou des taxes, etc. Vous avez l’ensemble du spectre des transactions sur un grand nombre de pays. Cela constitue une masse énorme de données. Et il est important que ces bases de données puissent converger pour que l’Afrique ait un vrai contrôle de son information économique.
Mais vous êtes également présent bien au-delà du Continent...
Kabirou Mbodje – Bien sûr. WARI est une société implantée dans 60 pays, dont 40 en Afrique – comme je l’ai dit –, douze en Europe, et nous sommes également sur le marché chinois avec un bureau à Shanghai, et présents aux États-Unis comme en Amérique latine. Voilà pour le positionnement géographique.
WARI, ce sont aujourd’hui 200 millions de personnes qui utilisent notre plateforme, 6 milliards de dollars de flux, plus d’un million de transactions journalières, 300 collaborateurs directs mais plus de 18 000 emplois générés, plus de 500 000 points de vente en direct ou à travers des réseaux partenaires.
Voilà les chiffres clés qu’il convient de retenir sur notre entreprise qui a un spectre très large de services allant des services basiques (comme les paiements, les transferts, l’électricité, l’eau) aux plus sophistiqués. Nous avons aussi créé un Fonds de solidarité, qui collecte 1 franc CFA par transaction, pour soutenir de nombreuses initiatives dans le domaine de la santé, de la microfinance et de l’éducation.
Que ne faites-vous pas… encore ?
Kabirou Mbodje – C’est une très bonne question ! Ce que fait WARI est très simple : elle rend disponible une plate-forme ouverte pour que tous les acteurs économiques échangent et puissent aujourd’hui offrir ou bénéficier de ces services. Et donc ce que nous ne faisons pas, c’est ce que font tous les autres et qu’ils intègrent sur notre plate-forme.
Quels sont vos projets et nouveautés pour 2019 ?
Kabirou Mbodje – Nous en avons beaucoup. Il y a des intégrations et des acquisitions sur différents marchés en Europe comme aux États-Unis. Nous sommes en train de développer trois applications qui vont apporter une vraie nouveauté mondiale et contribuer à changer la donne du numérique. Nous y travaillons, mais je ne peux vous en dire plus pour le moment. Vous en aurez le primeur en temps utile.
Un groupe comme le vôtre s’intéresse à la cyber-criminalité et à la cyber-défense pour s’en prémunir et se protéger. Quelles sont vos approches et solutions en ce domaine sensible ?
Kabirou Mbodje – C’est un problème patent et récurrent qui nous préoccupe, bien évidemment. Dès l’instant où vous entrez dans un monde ouvert, qu’on appelle « open society », où les gens sont globalisés et inter-connectés, cela constitue des « boulevards » pour des gens mal intentionnés qui veulent abuser du système. Cela a toujours existé et c’est, hélas, dans la nature humaine.
Une nouvelle sorte de « bandits de grand chemin », comme on disait autrefois ?
Kabirou Mbodje – C’est exactement cela ! Vous avez parfaitement raison, ces « bandits de grand chemin » sont aujourd’hui sur la toile, partout sur le Web. Comme tous les grands groupes, nous travaillons donc à sécuriser nos transactions et ces grands chemins que nous mettons à disposition du public.
WARI y est très sensible et essaie d’avancer sur des technologies de pointe pour pallier des moyens d’identification parfois assez sommaires en Afrique. Nous inventons des solutions pour identifier tous ces gens de manière formelle et contribuer à éliminer les menaces potentielles et surtout la fausse perception d’un risque supérieur en Afrique, ce qui n’est pas le cas.
Kabirou Mbodje, PDG de WARI, et Cina Lawson, ministre des Postes et de l’Économe numérique du Togo, lors de leur participation à la table ronde sur "Les nouveaux usages du Numérique en Afrique", mardi 23 octobre à Paris, au Forum Ambition Africa. © Benjamin Reverdit
L’Afrique n’est pourtant pas en retard dans ce domaine avec les « brouteurs » de Côte d’Ivoire, par exemple…
Kabirou Mbodje – Comme au Nigeria, c’est vrai. Mais l’Afrique arrive loin derrière tout ce qui nous provient d’Europe de l’Est, d’Amérique latine ou d’Asie... même si le monde digital tel qu’on le voit déferler sur le reste du monde a ses origines en Afrique.
C’est en réalité une problématique globale, et à laquelle il faut trouver de façon assez pragmatique des solutions collégiales, car nous sommes tous confrontés au même problème, aux mêmes méthodes, au même ennemi avec les mêmes pratiques. Il ne peut pas y avoir de concurrence entre nos entreprises à ce niveau-là, il faut au contraire qu’elles partagent leur savoir-faire de façon à contribuer non pas à éradiquer, mais à diminuer et à pouvoir anticiper sur les nouvelles générations d’attaques.
Quels sont vos principaux concurrents ?
Kabirou Mbodje – WARI a des concurrents dans l’ensemble des services qui sont offerts sur notre plate-forme, mais notre positionnement est unique. C’est ce qui fait la force et l’originalité de WARI, dont les services régulent la vie de tout le monde. Nous créons ainsi une vraie valeur ajoutée permettant aux gens de converger vers notre plate-forme de transfert d’argent où tout est standardisé et sécurisé.
Un message aux entrepreneurs français présents ici à l’événement Ambition Africa ?
Kabirou Mbodje – Comme je l’ai dit lors de la table ronde à laquelle j’ai participé, il y a aujourd’hui une énorme opportunité pour tous ceux qui veulent se positionner en Afrique. Ils doivent rechercher des plates-formes comme WARIpour pouvoir pénétrer le marché et proposer correctement leurs services car, quand il y a une multiplicité d’offres et de services, trop de choix dans un pays, cela crée parfois une espèce de cacophonie dissuasive et on ne sait plus où aller.
Il faut profiter d’une plate-forme organisée comme WARI qui permet aujourd’hui d’adresser plusieurs pays et d’être bien précis sur la cible que l’on veut atteindre et l’offre que l’on est capable de présenter.
On dit que Dakar est « une porte d’entrée en Afrique ». En va-t-il de même de WARI ?
Kabirou Mbodje – C’est exact. WARI se veut une porte incontournable et se positionne donc comme une plate-forme ouverte. Car il n’y a pas de possibilité d’échanger et de développer nos économies, de créer de la valeur ajoutée si l’on n’organise pas nos marchés avec des standards simples, compréhensibles pour l’ensemble des parties.
Source de l'article : www.africapresse.paris/Kabirou-Mbodje-PDG-de-WARI-Notre-plate-forme-digitale-se-veut-une-porte-d